Décarbonation : l’Europe rebat les cartes

Cet article, rédigé par Victoire Renaume, est extrait du Dossier Bois-Énergie publié dans le numéro 607 (octobre 2017) de Forêts de France.
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ALERTE SUR LES CRITÈRES DE DURABILITÉ DE LA BIOMASSE FORESTIÈRE

Si depuis 2009 l’Europe a clairement pris position sur la question des critères de durabilité de la biomasse liquide et les biocarburants, elle est toujours en discussion au sujet de la biomasse solide et gazeuse. Un projet de rapport européen, paru le 8 juin 2017, menace désormais la réalisation des objectifs climatiques et énergétiques de l’UE et la viabilité du secteur forestier en Europe. Le projet du député Bas Eickhout sur les critères de durabilité de la biomasse forestière soulève en effet trois dangers principaux.

Ignorer les critères de durabilité nationaux et européens

FdF 2017-607 p 32 Bois énergieLe rapport d’Eickhout ignore la réalité et met en danger tout le secteur forestier. Il propose une liste arbitrairement établie de types de biomasses forestières qui seraient considérées comme durables, faisant fi de toutes les législations nationales et européennes existantes sur la gestion durable des forêts. « La biomasse issue de forêts gérées durablement, destinée à l’énergie, ne serait pas suffisamment durable. Il faudrait légiférer davantage pour limiter certains types de biomasses à l’usage énergétique… On marche sur la tête ! » s’indigne Antoine d’Amécourt, président de Fransylva.

Rompre le cercle vertueux de la complémentarité des usages en forêt

La mise en œuvre du principe de l’utilisation en cascade voulue par la directive est irréaliste sur le terrain. Ces suggestions montrent un manque fondamental de compréhension du cycle de production forestière caractérisé par une utilisation interdépendante et intégrée de toutes les parties de l’arbre pour de nombreuses utilisations finales. « Si M. Eickhout avait pris le temps de discuter avec les personnes concernées et ceux qui mettent en place une gestion durable des forêts tous les jours, il aurait pu arriver à une proposition plus crédible », ajoute Antoine d’Amécourt.

Freiner les ambitions européennes de décarbonation de son économie

Les propositions envisagées dans le rapport de M. Eickhout mettraient en danger toute offre de biomasse durable de l’UE pour le secteur de la bioénergie, qui représente aujourd’hui 95 % de la biomasse provenant des forêts de l’UE. Lorsque les États-Unis quittent l’Accord de Paris il est plus important que jamais que l’UE reste un leader sur le climat et défende une politique judicieuse fondée sur les faits.

Le rapport de M. Eickhout n’a aucun lien avec la réalité du terrain. « Comment l’UE peut-elle atteindre son objectif de 45 % d’énergie renouvelable en 2030 tout en compromettant sa principale source d’énergie renouvelable : la biomasse ? » ajoute Jean-Marc Jossart, secrétaire général de l’AEBIOM (Association européenne de la biomasse). Nous devrions soutenir un développement économiquement viable d’une bioéconomie durable. La bioénergie joue un rôle important ici, tant pour atteindre les objectifs climatiques que pour soutenir un secteur forestier durable.

Victoire Reneaume