Préambule
Cette page est issue de la doctrine des syndicats de forestiers de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur provenant des travaux du Syndicat des Propriétaires Forestiers des Bouches-du-Rhône.
Une région sous-exploitée
Si nos départements de montagne (Alpes-de-Haute-Provence, Hautes-Alpes et Alpes-Maritimes) produisent toujours du bois d’œuvre, notamment du mélèze (50% de leur production, l’autre moitié étant vendue en bois d’industrie pour la trituration en vue d’une transformation en pâte à papier ou bois énergie), notre région, pourtant l’une des plus forestières de France métropolitaine (48 % de sa surface) a perdu l’habitude de produire du bois.
En effet, nous prélevons chaque année seulement environ 20 % de la nouvelle biomasse produite par nos arbres (accroissement naturel e l’ordre de 3 à 7 m3 par hectare suivant les essences et la qualité des sols, soit plus de 3 millions de m3 de plus chaque année qui ne sont pas prélevés).
C’est dire que nous sommes non seulement aux antipodes de la « déforestation » mais qu’au contraire la forêt gagne du terrain. À titre d’illustration, le Var comptait de l’ordre de 120.000 hectares de forêts au 19ème siècle alors qu’il en compte plus de 360.000 aujourd’hui.
Produire du bois est le premier rôle du forestier sylviculteur
Élever des arbres pour les couper lorsqu’ils sont devenus matures est non seulement normal mais c’est essentiel pour de nombreuses raisons :
- le bois est un matériau noble et renouvelable, écologique par excellence,
- les coupes permettent le renouvellement des peuplements. Or les vieux arbres jouent un moindre rôle écologique que les plus jeunes :
- ils stockent de moins en moins de carbone tout en con sommant l’eau et les nutriments contenus dans les sols,
- ils privent les plus jeunes de la lumière nécessaire à leur développement,
- ils finissent par tomber en créant des dégâts aux sous-étages,
- faute de coupe les milieux se referment, ce qui n’est ni bon pour la biodiversité ni pour le paysage, ni pour les usagers de la forêt (promeneurs, chasseurs, sportifs, bergers…),
- en prélevant des arbres, les forestiers diminue la biomasse combustible et contribuent ainsi à réduire les risques et les conséquences des incendies de forêts,
- c’est l’occasion de réaliser un revenu économique, certes limité tant que nos bois resteront sous-valorisés mais qui permet de contribuer aux dépenses d’entretien et aux investissements nécessaires pour préparer les peuplements aux conséquences des évolutions climatiques.
Nos pins d’Alep méritent mieux que d’être seulement triturés ou brûlés
Grosso modo la moitié des essences de nos forêts sont des feuillus et l’autre moitié des résineux, notamment des pins d’Alep dans nos départements littoraux (Bouches-du-Rhône, Var et Vaucluse).
Historiquement l’usine de pâte à papier de Tarascon (Fibre Excellence) représentait leur seul véritable débouché dont le quasi-monopole a conduit à un prix de marché particulièrement faible qui, compte tenu des coûts peu compressibles d’abattage, de débardage et de transport, ne laissait pas grand chose au propriétaire de l’arbre sur pied.
L’arrivée de nouveaux grands industriels producteurs d’énergie électrique à partir de biomasse (E.ON à Gardanne et Inova Var Biomasse à Brignoles), dont les usines sont sur le point de démarrer, change un peu la donne en offrant de nouvelles opportunités bénéfiques pour le retour à la vie de nos collines. Néanmoins, nous devons nous rappeler que nos anciens utilisaient largement les troncs de leurs pins d’Alep en charpenterie et en menuiserie (à cette époque notre région comptaient encore de nombreuses scieries locales).
Produire du bois d’œuvre donnera une meilleur valorisation de nos de pins d’Alep. Mais pour cela il faut d’abord « trier », mettre de côté les billons de qualité, ceux dont le diamètre et assez gros et dont les troncs sont bien droits et sans nœuds (ce qui se voit à l’œil nu mais aussi qui implique une sylviculture volontaire et des investissements dans le premier tiers du cycle de vie : dépressage, sélection des arbres d’avenir, élagage…) et dont les cœurs sont sains (là, en général il faut attendre d’avoir abattu l’arbre pour découvrir sa qualité, arbre que l’on a souvent déjà vendu sur pied à un exploitant qui n’aura pas eu tendance à prendre le risque de le payer à sa juste valeur de bois d’œuvre hypothétique mais qui empochera le bénéfice au grattage s’il tire un tronc gagnant).
Bois énergie : en route pour la mobilisation
Le bois a une valeur énergétique incontestable. Nos ancêtres (et même nos proches parents dans un passé pas si lointain) l’ont utilisé pour se chauffer. Au 19ème siècle, les maîtres de forges s’en sont emparés à tour de bras pour faire fonctionner leurs usines et alimenter la révolution industrielle jusqu’à ce que les énergies fossiles (charbon d’abord, pétrole, gaz naturel et atome ensuite) s’y substituent.
Aujourd’hui le bois redevient une source d’énergie renouvelable dont l’utilisation représente un bilan carbone nul (le carbone utilisé lors de sa transformation en énergie est équivalent au carbone qu’il a capté et stocké pendant sa croissance et son cycle de vie), Même si cet usage est parfois controversé, le bois est destiné à participer à la transition énergétique sous différentes formes et sa transformation en plaquettes forestières en masse implique une mobilisation générale des propriétaires de la ressource. Il faudra notamment, eu égard au grand morcellement de nos forêts, que les propriétaires de petites parcelles sachent se regrouper avec leurs voisins (PSG concertés, Associations Syndicales, Groupements Forestiers…) pour exploiter ensemble en réalisant en commun des coupes de taille suffisantes présentant un intérêt économique à la fois pour eux, en tant que vendeur et pour les exploitants forestiers (négociants) qui leur achèteront les coupes pour les revendre avec une marge raisonnable.
Les rémanents de coupe : déchet ou richesse ?
C’est comme dans le cochon, dans l’arbre tout est bon.
Sauf que bien souvent, après une coupe, il est fréquent de constater que le sol est « jonché » de petites branches, ce sont les rémanents, parfois mis en tas ou en andains, souvent laissés en vrac sur le « champ de bataille ».
C’est Beyrouth !!!
Il faut se rendre à l’évidence et l’admettre : exploiter une forêt, élaguer, faire une coupe, abattre un arbre… ne conduisent que rarement à un jardin d’agrément, à laisser une pelouse, voire un green de golf.
Que faire des rémanents ?
Il ne faut pas oublier qu’ils ont une valeur. On peut les laisser sur place (avec ou sans traitement tels que broyage ou brûlage) car ce sont des nutriments qui enrichiront le sol ou les enlever pour transformer cette biomasse en énergie. Mais, à moins de les abandonner à leur triste sort et attendre qu’ils se décomposent naturellement (ce qui peut prendre un certain temps, dépendant des essences, du climat ou de l’activité des petites bébêtes), leur traitement a un coût.
Le CRPF PACA a publié une doctrine concernant les différents traitements possible des rémanents de coupe, recommandant en priorité de les conserver sur place, au moins en les démantelant mais si possible en les broyant (ce qui a un coût et doit être prévu de manière explicite dans les contrats de vente de bois sur pied), en évitant de les brûler (notamment à cause du risque de départ de feu). Dans le cadre des OLD ou des travaux de DFCI les préfets (et même les maires) peuvent, dans certaines conditions, imposer des règles particulières s’appliquant aux rémanents allant jusqu’à leur enlèvement dans un délai donné.