4 000 ha de forêts de protection dans le parc national des Cévennes
Le parc national des Cévennes, créé en 1970, accueille en son cœur 60 000 hectares de forêts, également partagées entre propriétaires publics et privés. Les forêts sanctuaires que Peter Wohlleben appelle de ses vœux existent sur ce territoire protégé. Depuis le début des années 1990, le parc a mis en place avec l’ONF des espaces où l’homme n’intervient plus. Ainsi, le territoire compte aujourd’hui deux réserves biologiques intégrales couvrant 1 070 ha, auxquelles s’ajoutent 2 000 ha de forêts classées laissées en libre évolution. Au sein de peuplements exploités, il existe aussi 354 îlots de sénescence qui constituent une trame de vieux bois de 1 206 ha au total. Ces zones qui ne sont pas d’un seul tenant couvrent les différents étages du mont Aigoual, de la chênaie verte à 300 mètres d’altitude, jusqu’à la hêtraie sapinière d’altitude. Le parc souhaite amplifier cette politique dans les années à venir. « La charte fixe comme objectif 9 500 hectares de forêts en libre évolution », précise Sophie Giraud, responsable du pôle forêt. « Nous avons presque atteint notre objectif en forêt publique, nous devons désormais développer des outils pour convaincre des propriétaires privés. »
Pour l’instant, la forêt privée est seulement concernée par cinq contrats Natura 2000 destinés à protéger des arbres d’intérêt écologique. Le parc s’adressera en priorité aux propriétaires de forêts pas ou peu exploitables et l’engagement de ne pas exploiter sera pris dans le cadre du plan simple de gestion. « Nous devons travailler sur les outils contractuels et peut-être envisager des compensations. Chacun devra y trouver son compte. » « 9 500 hectares, cela représente 15% de la surface forestière », observe Sylvie Coisne, administratrice de Fransylva Occitanie et Fransylva Lozère. « Cela peut paraître beaucoup, mais il faut rapprocher ce chiffre du taux de forêt non gérées, c’est-à-dire délaissées » [N.D.L.R. : Dans un parc national, le principe de l’expérimentation devrait jouer, pourquoi ne pas proposer une location à l’hectare au propriétaire et soulager celui-ci des charges fiscales générées par sa forêt?].
Par ailleurs, le parc réalise des acquisitions foncières lorsqu’une opportunité se présente. Il est ainsi devenu propriétaire de 415 ha qui sont laissés en libre évolution. Pour l’instant, le parc valorise peu ces espaces de protection. Les zones sont difficilement accessibles et les visites doivent forcément être accompagnées. « Nous devons faire connaître ces forêts en libre évolution et inciter les scientifiques à venir y travailler », conclut Sophie Giraud.
Pascal Charoy
Reforest’Action privilégie une vision équilibrée de la forêt
Reforest’Action est une entreprise à vocation sociale qui permet aux particuliers et aux entreprises d’agir en faveur de la reforestation en France et dans le monde. Son fondateur et président, Stéphane Hallaire, a été invité à participer à quatre débats qui ont suivi la projection du film L’Intelligence des arbres en région parisienne. Ce documentaire a selon lui un intérêt majeur: il ouvre le débat et permet d’aborder différents points de vue sans forcer le trait. « En donnant à voir la complexité de l’arbre en tant qu’être doué de sensibilité et capable d’interaction, il permet au grand public de prendre conscience de l’attention qu’on doit lui porter », souligne Stéphane Hallaire.
Il tempère néanmoins les propos du film lorsque celui-ci condamne la récolte des arbres. « Reforest’Action souhaite avoir de la forêt la vision la plus équilibrée possible, une vision très multifonctionnelle », explique Stéphane Hallaire. « Oui, l’arbre est un être vivant, c’est indéniable, en revanche, la forêt joue aussi un rôle économique. Couper un arbre n’est pas un crime dès lors qu’on le fait pour utiliser son bois et assurer la pérennité de la forêt.» Stéphane Hallaire relativise donc les conclusions du film et du livre : « La forêt alimente une industrie dont nous bénéficions tous. Nous aimons l’arbre, nous aimons aussi le bois. La forêt est un écosystème avec des êtres en concurrence, ce n’est pas un paradis sur Terre comme le laisse parfois entendre le film. Lors des débats, j’ai en face de moi des citadins qui ne sont pas dupes : ils savent que nous ne vivons pas dans un monde de bisounours. »
Articles publiés dans Forêts de France n°609 de décembre 2017 (page 32).
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