Cette page est extraite du dossier Grands ongulés, la forêt sous pression publiée dans le n°615 (juillet/août 2018) de Forêts de France
La Nouvelle-Aquitaine dans le vent
Comment protéger 200 000 hectares de jeunes plantations contre la dent du grand gibier ? Dans les Landes de Gascogne, c’est grosso modo la surface qui a été replantée après la tempête Klaus. Et l’abondance du cerf rend quasiment impossible la protection de ces centaines de millions de plants.
Les acteurs forestiers jouent donc la carte de la prévention grâce à un observatoire du grand gibier né en Gironde avant la grande tempête. Il s’agit d’une plate-forme Internet qui permet aux chasseurs et aux forestiers d’échanger des informations, en particulier sur les zones où les cervidés commettent le plus de dégâts.
« Il y a vingt ans, les propriétaires ont commencé à faire des signalements de dégâts sur papier », observe Éric Dumontet, secrétaire général du syndicat des sylviculteurs du Sud-Ouest. « Nous recevions les feuillets A4 à la Maison de la forêt et nous les mettions dans des dossiers pour ensuite discuter des plans de chasse dans les commissions départementales. »
Avec l’arrivée des outils numériques, les choses ont bien changé. Désormais, les sylviculteurs déclarent leurs dégâts en ligne et les informations sont centralisées sur une plate-forme numérique. En quelques clics, le forestier, le chasseur, ou leurs représentants peuvent accéder à la cartographie des zones de dégâts.
Inauguré en Gironde, le dispositif a été progressivement étendu au massif des Landes de Gascogne. Depuis 2017, le télésignalement est possible dans les douze départements de la Nouvelle-Aquitaine grâce à une fiche de dégâts commune, accessible depuis Internet. Dans l’ex-région Aquitaine, les propriétaires utilisent de plus en plus l’outil. Ils étaient 185 en 2014, 488 en 2017 et déjà 327, pour une surface de 2 066 hectares, pour les cinq premiers mois de l’année!
Quelle incidence sur les plans de chasse ?
Est-ce à dire que les dégâts vont crescendo ? « Je le pense, poursuit Éric Dumontet, ils sont dus à la prolifération du cheptel et au rajeunissement de la forêt. »
Et pour éviter les critiques des chasseurs, les forestiers ont mis en place un garde-fou. Le propriétaire ne peut valider seul sa déclaration. Il doit la transmettre à son entreprise de reboisement ou à son conseiller forestier, un intermédiaire qui se réserve la possibilité d’aller vérifier sur le terrain. Les deux tiers des surfaces déclarées sur sig.cartogip.fr ont fait l’objet d’une vérification.
Quelle incidence sur les plans de chasse ? Elle est réelle. Certes, l’observatoire ne fait pas la pluie et le beau temps. Il complète d’autres informations comme les comptages d’animaux, les dégâts agricoles, les indices de consommation. « Dès lors que les dégâts concordent avec les autres indicateurs, cela pèse sur les plans de chasse. Nous avons par exemple obtenu à la dernière CDCFS de Gironde une augmentation de 30 % du plan de chasse du cerf sur certaines unités de gestion. »
C’est donnant-donnant. À partir du moment où les chasseurs jouent le jeu, à l’inverse, les sylviculteurs acceptent des baisses d’attribution sur des zones où les efforts ont été réalisés au bon moment.
Le Sud-Ouest est le secteur en France où le taux de réalisation est le meilleur, souvent proche de 90 %.