Article de Pascal Charoy publié dans de Forêts de France n°610 (janvier/février 2018). Pour en savoir plus sur Forêts de France et/ou vous abonner : cliquez ici
Le groupement forestier, aspirateur de petites parcelles
À 20 km de Limoges, le groupement forestier de Puymenier a réuni en quarante ans 478 parcelles de taillis pauvres. Les 141 ha de la nouvelle entité, reboisés à 55 % en douglas, valent aujourd’hui 350 000 €. Quelques clés pour comprendre cette renaissance.
Une forte volonté politique
Le groupement forestier de Puymenier a été créé en 1977 à l’initiative de la SAFER et de la Société d’aménagement pour la mise en valeur des régions Auvergne et Limousin (Somival). Les deux organismes ont réussi à regrouper les propriétaires de 135 parcelles de vieux taillis afin de créer une unité de gestion de 41 ha. Objectif : reboiser tout ou partie de ces surfaces en douglas avec les aides du Fonds forestier national. Pari tenu en 1980. Les parts du GF valaient alors 15 €, soit 100 francs de l’époque.
Quarante ans plus tard, le GF de Puymenier compte 141 ha en deux unités de gestion proches de quelques centaines de mètres. 55 % des surfaces accueillent du douglas, 10 % du hêtre et il subsiste quelques parcelles de taillis. En quarante ans, le GF est parvenu à cristalliser 478 parcelles d’une surface moyenne de 30 ares. Et 29 actes notariés ont été nécessaires…
Alors ingénieur en informatique à Paris, Georges Savitzky a pris la gérance du groupement en 1977 parce que son épouse possédait sur place quelques parcelles de bois. Il ne connaissait rien à la gestion forestière et s’est appuyé sur l’expertise de la SAFER et de la direction départementale de l’Agriculture. Installé sur place depuis 1996, il prend désormais les grandes décisions en accord avec les associés. Disponible, et au fait de la sylviculture, il consacre la majorité de son temps à cette gérance bénévole.
La part du GF double en douze ans
Et pourtant, tout a failli s’arrêter au lendemain de la terrible tempête Lothar. En décembre 1999, elle a renversé 16 millions de m³ de bois en Limousin. À Puymenier, 70 % des plantations résineuses sont tombées par terre. Grâce aux aides de l’État, le GF va renaître et puiser dans cette épreuve l’énergie pour s’agrandir. Georges Savitzky convainc des amis parisiens d’investir dans la forêt. Entre 2005 et 2008, trois augmentations de capital autoriseront l’acquisition de 55 hectares supplémentaires, avec pour la plus grosse entité de 42 ha l’appui de la SAFER. Derrière ces achats naîtront 20 ha de douglas, des parcelles de pins Laricio, mélèze et cèdre.
La propriété est aujourd’hui estimée à 350 000 €. La part du GF, qui valait 50 euros après la tempête, a été estimée l’an dernier 102 euros. Elle a doublé en douze ans ! Parmi les 31 porteurs de parts, 12 restent attachés à Puymenier. Georges Savitzky reconnaît que ce bilan financier doit beaucoup aux aides : celles obtenues par le FFN et pour les reboisements post-tempête. Mais une gestion au quotidien est indispensable. Le budget de fonctionnement est pour l’instant peu alimenté par la ressource bois, plus régulièrement par la chasse ; et dans une moindre mesure, la production de bois de chauffage permet de payer les travaux d’entretien des jeunes plantations. En 2016, l’une des premières récoltes de bois d’industrie et de bois d’œuvre a rapporté 20 000 € qui seront investis l’an prochain dans le reboisement de parcelles sans valeur. Les 12 ha de douglas les plus âgés (40 ans) sont désormais assurés par Sylvassur. Ils seront une dernière fois éclaircis en 2019 avant leur coupe rase en 2027.
Âgé de 84 ans, Georges Savitzky aura probablement transmis le témoin. Avec sérénité car il a prévu la suite en invitant à la cogérance une ingénieure forestière membre du GF et son petit-fils de 35 ans… informaticien à Paris.