Nos forêts sont en danger
La biomasse, une des énergies renouvelables les plus économiques, l’or vert de notre région Provence-Alpes-Côte d’Azur qui a bien besoin de redonner vie à ses collines boisées (48 % de sa surface), est en danger.
Une conversion décarbonante
Constatant que notre région est en mal de production d’électricité (nous sommes même une péninsule !) et que nous regorgions de forêts en croissance et sous-exploitées, ce qui n’est ni bon pour la biodiversité ni pour les risques d’incendies par les temps qui chauffent, la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE) a retenu en 2011 deux projets « biomasse » en PACA (Uniper à Gardanne et Inova à Brignoles).
Les experts de l’État (DRAAF, DREAL, ADEME…), la Région, les professionnels de la filière, les forestiers privés (Fransylva, le CRPF, la Coopérative Provence Forêt) et publics (ONF, Communes Forestières…), les experts de la qualité de l’air, de la santé, des transports, de l’environnement, bref toutes les compétences concernées, ont travaillé d’arrache-pied pendant 5 ans pour accompagner Uniper qui a investi près de 300 millions d’euros pour transformer sa centrale à charbon en une unité de production d’électricité à base de biomasse, prête à démarrer dans les meilleures conditions et en total respect des exigences d’un cahier des charges dont on peut dire qu’il ne brillait pas par sa légèreté.
Écolos + TA = un « tronc » dans les roues
Et ne voilà-t-il pas que les spécialistes des chicanes de dernier recours viennent de réussir à mettre un tronc (plus qu’un bâton) dans les roues d’un projet exemplaire en poussant un juge d’un Tribunal Administratif local à céder à leurs murmures et à leurs chants d’oiseaux de mauvais augures.
Une insulte aux gens sérieux et responsables
Ayant participé le plus sérieusement qu’il soit possible pour un forestier rural, simple ingénieur diplômé de l’École Polytechnique, et avec une assiduité qui n’a rien eu de buissonnière, dans le cadre de la Commission Régionale Biomasse, à la quasi totalité du suivi des études qui ont veillé à la bonne fin de ce projet respectueux de toutes les contraintes qu’il était raisonnable de lui imposer, je m’insurge contre une telle décision que je reçois comme une insulte à la compétence et à la responsabilité de tous ceux qui ont œuvré depuis si longtemps et dont les contributions se voient balayées en quelques minutes par des attendus plus que contestables qu’il nous faut maintenant contester. Que de temps et d’énergie (non renouvelable) perdus.
- Ce n’est pas le bois qui manque (on récolte en PACA moins du quart de l’accroissement naturel annuel) et les plans d’approvisionnement précis ont fait l’objet d’études détaillées avant d’être validés et approuvés…
- La filière est mieux organisée qu’on veut le faire croire, l’interprofession fonctionne et les exploitants forestiers sont des professionnels sérieux…
- Nos forêts sont gérées durablement par leurs propriétaires, la coopérative, les experts et autres gestionnaires professionnels. En plus, Uniper n’accepte que des bois provenant de forêts certifiées PEFC, respectant évidemment toutes les contraintes, notamment celles liées à Natura 2000 (qui, en outre, sont loin d’être les plus contraignantes…
Les écologistes c’est nous, Fransylva, premier « parti écologiste » de France. Rien à voir avec des « écolos », ou des « écolocrates » qui sont à l’écologie ce que les technocrates sont à la technologie.
Frédéric-Georges Roux,
citoyen varois rural
militant environnementaliste forestier
mais aussi, à titre accessoire et bénévole :
- Président du Syndicat des Propriétaires Forestiers Sylviculteurs du Var
- Président de l’Union Régionale des Syndicats de Forestiers Privés
- Vice-président de l’interprofession régionale de la filière Forêt-Bois
- Vice-président du Centre Régional de la Propriété Forestière
PS : Je ne résiste pas à vous livrer ci-après le coup de gueule de mon ami Jean-Étienne Rimes qui exprime, avec d’autres mots que les miens une pensée que je partage à 100 %.
Écologistes incendiaires
Mais quelle bonne idée de vouloir préserver l’environnement en boutant un grand industriel allemand hors de la belle Provence ! Et ça marche parce que à coup de slogans engendrant des peurs, les associations ont réussi à exister… au détriment même de la cause qu’ils souhaitent défendre.
Uniper a investi plus de 250 millions d’euros pour créer la première centrale biomasse de grande taille à Gardanne à la place d’une centrale à charbon et voilà qu’après avoir innové et créer ses installations, cette entreprise se voit tout simplement retirer son droit d’exploiter. Dommage, elle offrait un débouché fantastique aux bois de faible valeur, largement disponibles et qui s’accroissent fautes de débouchés dans les forêts de la région PACA et Occitanie. De plus, elle contribuait à la création d’une filière forêt/bois permettant d’installer des scieurs, des transformateurs pour valoriser les essences nobles et les bois d’œuvre et créer ainsi une nouvelle source de nombreux emplois qualifiés dans la région.
Mais voilà, c’est un industriel, mot horrible et incompatible avec les vertus écolos et en plus, il est allemand et énergéticien, donc pollueur. A bannir.
Regardons de plus près. Ces forêts du sud-est sont pour la plupart insuffisamment entretenues et les propriétaires publics ou privés n’ont pas de débouchés suffisants. Ils n’ont pas les moyens d’entretenir puis récolter les arbres pourtant matures avec des conséquences souvent dramatiques dont bien sûr les incendies qui font le feuilleton de chaque été. C’est ce qui est le plus visible, mais au-delà, la forêt s’appauvrit, la biodiversité en pâtit, les fonctions naturelles, qualité des eaux, qualité de l’air, le captage de CO2 en particulier ne se fait plus parce que l’arbre ne croît plus. Bref, il n’y a pas moins écolo que cette forêt abandonnée et sous des aspects naturels, elle est dans un état catastrophique. Jamais dans l’histoire de la région elle n’a été aussi délaissée.
Que ferait alors notre industriel. Tout simplement, il achèterait des bois de qualité médiocre permettant de replanter ! Oui, replanter ou régénérer et donc d’installer les essences vernaculaires productives qui en poussant purifieront l’eau, capteront des millions de m2 de CO2 ce qui n’est plus ne cas, créer des coupe-feux et des chemins sûrs. Il dynamiserait la filière, créant des emplois durables et non délocalisables pour l’entretien, la récolte, la transformation. Plus d’arbres en bonne santé et plus variés, la biodiversité profiterait abondamment de ce changement. Replanter, aménager, dynamiser, c’est bon pour les hommes, bon pour l’environnement, bon pour l’économie régionale, oui, mais ce n’est pas bon pour les écolos doctrinaires et procéduriers. Ils préfèrent créer des peurs quitte à ce que la forêt brûle, sanctuariser une forêt stérile et entretenir les sangliers, taper sur un industriel sans voir ses investissements et les emplois induits qu’il génère. Ils ont très forts pour expliquer une coupe rase en taisant les actions de replantation, ils sont parfaits pour médiatiser des friches sans parler des milliers d’hectares plantés par nous, forestiers.
Et bien mesdames et messieurs les donneurs de leçons écologistes, assumez les catastrophes à venir que vous porterez sur seront sur votre bonne conscience. Les forestiers du sud-est, n’ont pas oublié les terribles incendies d’aout 2016. Comme tous les sylviculteurs de France, ils sont les premiers à agir dans notre pays pour l’environnement. Nous avons décidé de ne plus nous taire, nous agissons, nous plantons, nous régénérons, nous entretenons, nous cultivons, nous récoltons… nous sommes des écologistes actifs et militants de terrain.
Jean-Étienne Rime
Consultant et sylviculteur